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Marek Janowski et Violeta Urmana à la Salle Pleyel, le 6 janvier 2013. Photo d'après Josée Novicz.

Marek Janowski et Violeta Urmana à la Salle Pleyel, le 6 janvier 2013. Photo d’après Josée Novicz.

Bon, correct, extraordinaire : en résumé, le concert donné à Pleyel par le « Philar » (ça fait connaisseur, ou bien ?) de Radio-France, dirigé par Marek Janowski, accompagnant divers solistes.
Pour ce second volet Wagner, la première partie s’ouvre sur l’enchantement du Vendredi Saint, scène vedette de Parsifal. On y retrouve Stephen Gould en Parsifal, et on y découvre Albert Domhen en Gurnemanz. Le premier est à la hauteur de ce que l’on a entendu le 4 janvier : la voix est superlative, sûre, précise, tenue de bout en bout et sous toutes les coutures ; mais, en prime, le chanteur vit son personnage, cette fois, et stupéfie le public par son mélange de puissance, d’aisance et de musicalité. Albert Dohmen, que le programme présente comme le Wotan de référence, ce qui est un peu prétentieux, offre un Gurnemanz sérieux mais manquant assurément de coffre pour résister à un orchestre peu soucieux d’accompagnement : sa voix est souvent couverte par la masse, ce qui n’est pas sa faute mais bien celle de musiciens sans doute mal dirigés par Marek Janowski (ils ne sont pas en fosse, un peu de discrétion ne nuirait pas). D’autant que la suite leur permet de bien s’exprimer tout seuls : Siegfried-Idyll, chant d’amour sans parole de vingt minutes, sonne plutôt bien, même si on aimerait, et c’est bien notre droit prétentieux de spectateur, plus de cohérence, de tension dans les transitions, ces parties qui ne sont ni spectaculaires ni dégoulinantes de joliesse amoureuse.
La seconde partie reste le moment très attendu de l’après-midi. Dans une salle Pleyel pas tout à fait pleine, se donne la fin du Crépuscule des dieux, id est le voyage de Siegfried sur le Rhin, la marche funèbre pour le héros incestueux et l’immolation de Brünnhilde (qui, rappelons-le, récupère l’anneau maudit et se jette dans le brasier cramant son époux afin d’y périr avec son Grane, ce qui est la marque d’une sacrée salope, mais bon). Aux commandes vocales, Violeta Urmana. On l’avait entendue chanter Verdi à Bastille, elle était malade, c’était sublime ; on l’avait entendue mourir en Isolde le 4 janvier, c’était magnifique ; la voici sur le point de se barbecuiser, et c’est d’emblée magique. L’interprète, de la voix à l’esprit, impose d’emblée sa marque : timbre exceptionnel, aisance et présence. Regrettera-t-on, pour ne pas jouer au fana fada, certains aigus propulsés un peu vite ? Ils sont sans aucun doute dans l’esprit du personnage. Pas une note n’est escamotée, pas une tenue n’est truquée, pas un exploit pyrotechnique n’est oublié. Malgré la difficulté du morceau, tout sonne musical, tout est prenant, et l’interprète profite pleinement de ne chanter « que » cet extrait pour affiner une exécution plus divine que crépusculaire. On en oublie même – momentanément – les inégalités de l’orchestre – départs sporadiquement imprécis, accents plus violents que puissants, difficulté à tenir la distance avec la même intensité. Parmi d’autres, plusieurs fois, les cornistes sont en souffrance ; et on ne parierait pas que les cordes aient toujours joué au bon moment leur partition. Néanmoins, sur l’instant, peu importe : l’excellence de la cantatrice emporte toute réserve sur son passage.
Si on survit jusque-là, on la reverra cette année même à l’Opéra de Paris. Avec une nouvelle peur au ventre : sera-t-elle à la hauteur de son excellence wagnérienne ? Inch’Allah, je vous raconte, promis.
Psitt : le concert sera diffusé le 14 janvier à 14 h sur France-Musique…

Violeta Urmana et Bertrand Ferrier (Salle Pleyel, 6 janvier 2013). Photo : Josée Novicz

Violeta Urmana et Bertrand Ferrier (Salle Pleyel, 6 janvier 2013). Photo : Josée Novicz