Pierre Réach joue 9 autres sonates de Beethoven (Anima) – 4/8

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Première du disque

 

Les beethovénophiles considèrent que leur héros n’a jamais – ou presque – écrit de “petite sonate”. Tout au plus, bien obligés, acceptent-ils de reconnaître que certaines sonates sont plus courtes que d’autres, avant d’ajouter que la quantité n’est pas forcément un bon critère de jugement en musique. Reste que c’est surtout grâce aux intégrales (et un peu grâce aux pianistes débutants) que survivent les deux sonates opus 49, sans doute composées en 1797 mais publiées en 1805 – d’où le fait qu’elles soient considérées comme les dix-neuvième et vingtième sonates, alors qu’elles étaient probablement plutôt autour de la cinquième place.
Première de ces deux sonates en deux mouvements et huit minutes chrono, la dix-neuvième en sol mineur s’ouvre sur un Andante dont Pierre Réach apprête les charmes :

  • délicatesse (qui n’est jamais mollesse, alléluia !) du toucher,
  • respirations opportunes,
  • soin apporté aux ornements,
  • légèreté de l’accompagnement et
  • savants contrastes d’intensité

séduisent l’oreille et le cœur. S’immisce alors un rondo allegro ternaire qui alterne modes majeur et mineur. On s’y goberge

  • d’énergie sautillante,
  • d’allant gambadant et
  • d’une douceur que l’on n’attribue pas souvent à LvB,

plus spontanément associé à un ronchon irascible.

  • La précision de l’interprète,
  • sa façon de poser la note ou l’accord qui relance le discours, et
  • sa palette de nuances

convainquent que Kaspar, le frère de Ludwig, a eu raison de publier cet opus contre l’avis du compositeur ! Le second numéro d’opus, donc la vingtième sonate en Sol, se décapsule sur un Allegro ma non troppo qui associe l’efficacité d’une mesure binaire à la souplesse des triolets.

  • Rebond guilleret des notes répétées,
  • habileté de la pédalisation (résonance, oui oui, confusion, non non) et
  • agilité digitale de Pierre Réach

servent au mieux une partition absolument interdite au Schtroumpf grognon et aux mélomanes de mauvais poil tant, malgré une petite embardée modulante en mineur, l’itération obstinée de formules

  • dansantes,
  • simples,
  • presque enfantines

risque de les ulcérer et de renforcer leur mauvais-poilisme. Quoi que, parfois, quand on est de mauvais poil, être encore plus de mauvais poil est satisfaisant. Dans cette hypothèse, la sonate est vraiment 100 % pour eux car le Tempo di menuetto ne retranche pas grand-chose à l’esprit dansant et souriant qui règne ici.

  • Clarté des lignes,
  • valorisation des éléments dynamisants
    • (rythme pointé,
    • triolets,
    • questions-réponses,
    • modulations…),
  • habileté de la coloration
    • (toucher,
    • phrasé,
    • nuances…)

nous confirment que, pour Pierre Réach, il n’y a pas de petite sonate de Beethoven, même si certaines sont plus proches de la plaisante ritournelle que du monument impressionnant. Pour les auditeurs pratiquant une écoute continue des deux disques du coffret, c’est précieux car l’opus 49 forme ainsi une respiration indispensable entre la “Pathétique” et la “Waldstein” qui nous attend au coin de la prochaine chronique !


Épisodes précédents
Sonate opus 2 n°2
Sonate opus 10 n°1
Sonate opus 13 (“Pathétique”)