Nicolas Horvath joue les premiers « nocturnes secrets » de Frédéric Chopin (1001 notes) – 1/4

admin

Première du disque

 

C’est sous la forme d’un polar que Nicolas Horvath présente sa chasse aux « nocturnes secrets » de Frédéric Chopin. Très riche, son livret piquera néanmoins sévèrement les yeux des lecteurs pointilleux , tant

  • l’orthographe
    • (« au grès de »,
    • « mises à nue »,
    • « Déborah Hayes » pour « Deborah »,
    • « à ce moment là » sans trait d’union…),
  • la conjugaison
    • (« Robert Orledge me permis »,
    • l’intégrale « inclue » certains nocturnes,
    • « nous n’avons pas retenus ») et
  • l’orthotypographie
    • (capitales aléatoires,
    • absence d’italiques sur les titres rendant certaines phrases inintelligibles à la première lecture,
    • espaces manquantes entre « p. » et numéro de page…)

auraient gagné à être révisés par un professionnel – il appert, sans trop de surprise, que l’écriture, comme

  • l’interprétation d’une œuvre de musique savante,
  • l’accord d’un piano ou
  • l’enregistrement d’un disque,

par exemple, mérite d’être soutenue par des gens qui, quoique faillibles, en ont fait leur métier. Néanmoins, sans doute faut-il transformer cette observation objective en signification subjective. En effet, les fautes grossières et patentes qui souillent çà et là le texte témoignent aussi de la singularité d’un artiste souhaitant contrôler au plus près, et jusque dans les détails souvent délégués à autrui, sa discographie déjà conséquente. Dans ce nouvel opus, comme à son habitude, il a enregistré lui-même son Steinway dans son studio, mais il est allé plus loin : il a inventé – aux sens rhétorique, archéologique et technique – une autre vision des nocturnes de Chopin.

  • Invention rhétorique, dans la mesure où l’inventio est la première étape de l’élaboration d’un discours argumentatif (les étudiants de Lettres se souviennent sans doute encore des longues et passionnantes analyses que ce sujet a inspirées à Marc Fumaroli…) ; or, Nicolas Horvath montre bien pourquoi et comment il a cherché, déniché et choisi le répertoire ici exécuté.
  • Invention didactique, dans la mesure où l’invention désigne le fait de trouver, d’exhumer, de découvrir ; or, c’est bien à la découverte de la face cachée de nocturnes supposés marmoréens et bien connus que nous invite le pianiste.
  • Invention technique, dans la mesure où l’invention désigne la méthode permettant de résoudre un problème pratique ; or, Nicolas Horvath se fait fort de résoudre une tension a priori irréfragable entre la précision d’écriture consubstantielle à Frédéric Chopin (fixée par le célèbre « Il n’y a que Chopin qui ait le droit de changer Chopin » mythiquement claqué par Chopin à Liszt) et l’existence de versions manuscrites de certains nocturnes contredisant l’édition officielle.

Le pari de Nicolas Horvath est qu’il n’y a pas de contradiction mais une complémentarité entre des versions éditées sous la surveillance du compositeur et des

  • ajouts,
  • modifications et
  • nouvelles indications retrouvées sur certains manuscrits des mêmes morceaux,

le tout partant d’un étonnement :

 

On interprète toujours les dernières versions des compositeurs, je me suis souvent demandé pourquoi ce n’était pas le cas pour Frédéric Chopin.

 

Le pianiste s’est donc transformé en

  • rat de bibliothèques et d’archives pour repérer puis décrypter des pages inédites, et
  • petite souris pour se faufiler dans la tête du compositeur en mêlant
    • ses observations,
    • des échanges avec les musicologues les plus pointus et
    • son oreille de musicien pour choisir les versions alternatives les plus saisissantes.

L’objectif ? Dépasser à la fois le critère de La Partition Définitive À Respecter À La Lettre, et celui du « bon goût » dont on sait que c’est sans doute la chose du monde la moins partagée, sauf par les gros imbéciles daubés de l’entre-fesses. Allier

  • intuition,
  • interrogation et
  • direction artistique ferme

semble le projet de la nouvelle aventure dans laquelle le virtuose éclectique s’est lancé… et dont nous raconterons l’écoute dans la prochaine notule !

 

À suivre…


Pour acheter le disque digital ou physique (et même l’écouter !), c’est par exemple ici.