Irène Duval et Aurélien Pascal, Institut Goethe, 19 décembre 2017

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Irène Duval et Aurélien Pascal à l’institut Goethe. Photo moche mais on fait c’qu’on peut, donc, parfois, peu : Bertrand Ferrier.

Donner à de jeunes artistes plus que confirmés (si, quand t’es dans le Top 4 du concours Reine Elisabeth, même pour les gens qui pensent que la royauté, c’est de la merde, t’es plutôt un artissplukonfirmé) l’occasion de se produire en public, indépendamment de la promotion d’un album semble être le projet de la série « Kronberg Academy » rythmant la vie culturelle, impressionnante, de l’institut Goethe.
Elle s’ouvre, ce 19 décembre, avec un défi relevé par Aurélien Pascal, violoncelliste soucieux de se frotter à la troisième Suite dite « pour violoncelle » de Johann Sebastian Bach. D’emblée, l’association entre une chaleur du son, un sens de l’attaque et un souci de caractérisation séduit. Pas déstabilisé par les applaudissements intempestifs entre les mouvements, le musicien s’attache à rendre la dynamique de la suite en l’unifiant par la clarté avec laquelle il fait sonner chaque note, et en la contrastant par la dynamique propre rendue à chacun des six mouvements et demi.

L’exceptionnel Aurélien Pascal à l’institut Goethe. Photo moche : Bertrand Ferrier.

Devant une telle démonstration de maîtrise et de musicalité, la redoutable fugue extraite de la première sonate pour violon du même zozo, quelque honorablement exécutée qu’elle soit, paraît un peu légère. Est-ce pour compenser cette inéquité qu’Irène Duval, robe sexy et talons (des mémés l’alpagueront après le concert sur le thème du « vous faisiez plus grande avant »), ose le vigoureux Paganiniana de Nathan Milstein ? Elle n’en exacerbe pourtant pas la pure virtuosité. Un tempo sage aspire à dépasser la démonstration pour laisser imaginer à qui le veut bien une puissance émotive au-delà de l’exercice impressionnant. Plaisir du beau contre ivresse de la pyrotechnie : on est pour, même si la pièce choisie n’est peut-être pas la plus idoine du répertoire pour faire chanter l’instrument.
Deux inventions (BWV 777 et 779) renouent avec Bach et annoncent la partie duettiste de la soirée. Le grand moment n’en demeure pas moins, expression bien pourrie mais tellement prétentieuse qu’elle fait classe, in a way, l’ample duo de Zoltán Kodály, où l’acoustique de l’institut ne rend pas forcément justice d’un débat-duel où l’engagement du violon répond aux nombreux langages du violoncelle, entre lyrisme coll’ arco et pizzicati arythmiques. Cela n’empêche pas Aurélien Pascal de briller par sa capacité à faire sonner son instrument en dépit d’une partition hérissée de difficultés. Seule déception : que le concert s’achève sur la Passacaille de Händel revue par Johan Halvorsen. Même si c’est un tube, ou parce que, ou à cause que avant y avait de la grande musique, ça sonne un brin creux en dépit de la technique sollicitée. Oui, on sait que c’est joué par de grands ziciens, mais on doit bien avouer que l’on est déçu par cette fin pleine d’exigences mais frustre en musique.

Avenue d’Iéna et sylviculture, un projet pour le vingt-et-unième siècle. Photo : Bertrand Ferrier.

Pas de quoi remettre en cause la qualité de la soirée proposée pour une somme rigolote oscillant entre 5 et 10 €, pot final compris (oui, nous étions invité, mais nous croyons que cela n’impacte pas outre mesure notre estimation admirative, na). Vivement le 9 janvier pour le prochain concert de la série. Si vous êtes francilien ce jour-là, que vous aimez les découvertes et le beau son, la partie allemande de l’avenue d’Iéna is the place to be!