Irakly Avaliani joue « Un autre Mozart » (2006) – 3/5
Irakly Avaliani a conçu un programme en arche avec coda :
- un rondeau, une sonate,
- une sonate, un rondeau et
- un bis.
Nous voici arrivé au seuil de la seconde partie de l’arche, donc à la seconde sonate (la KV 310 en la mineur), un gros machin de plus de vingt minutes qui se décapsule sur un Allegro maestoso où la tentation de fuser infuse, si si.
À main droite,
- anacrouse,
- staccato et
- rythme pointé.
À main gauche,
- urgence des accords répétés,
- des contretemps et
- d’un bariolage roboratif.
Le pianiste privilégie
- légèreté digitale,
- contrastes et
- soin du phrasé
à une emphase de l’urgence.
- Modulations,
- chromatismes,
- dialogues entre les mimines et
- itérations
énergisent la partition sans convaincre de la nécessité – autre qu’utilitaire pour le compositeur – des reprises.
L’andante cantabile con espressione en Fa se déploie en ternaire et avec cette même envie d’avancer.
- Vibration des trilles,
- rebond des deux en deux,
- sursaut des mordants et
- autres recettes goûtées précédemment
- (anacrouse,
- contretemps,
- staccati…)
animent ce mouvement lent, oui, mais pas si mou qu’on le pourrait craindre. L’art qu’a forgé Irakly Avaliani
- de poser la note,
- de respirer,
- d’étirer le spectre des nuances piano (le Fazioli est joliment réglé par Jean-Michel Daudon et capté sans fanfreluche par Sébastien Noly) et
- d’étager le son
permet au sceptique de suivre ces plus de dix minutes sinon avec émotion, ce serait mentir, du moins avec intérêt, même si, décidément, dans notre tour d’ivoire, les reprises ne nous paraissent pas toujours indispensables. On en profite néanmoins pour goûter ce qui se dévoile, parmi quoi
- une science confondante de la pédalisation
- (résonance,
- clarté,
- clôture de l’effet),
- la maîtrise du legato et
- le travail du son dans les passages toniques aux notes ou intervalles répétés, mais aussi dans la caractérisation des différents registres convoqués.
Le presto à deux temps, entre bref et concentré, revient en la mineur et poursuit dans la veine délicate qu’aime à creuser l’interprète. Impossible de ne pas se délecter
- de la variété des attaques,
- de la profondeur sonore qui éclaire le propos en étalonnant les voix,
- du sens du swing dont le charme opère puissamment et
- de la force de l’agogique dont la légèreté renforce l’efficacité
jusqu’à presque faire oublier le grondement sourd qui marque l’arrivée du passage en majeur. Le retour du mode et du motif liminaires permet à l’auditeur de profiter d’une coda associant
- sautillements,
- vrombissements du grave et
- efficience décidée des octaves répétées.
De quoi nous donner – et c’est heureux – envie de consulter tout bientôt la piste suivante : le rondeau en Ré KV 485. À suivre, donc !
Pour écouter gracieusement le disque en intégrale, c’est, par ex., ici.
Pour réserver en vue du concert Beethoven avec lequel Irakly Avaliani fêtera ses 75 ans dont 65 de carrière, c’est, par ex., là.