Fruits de la vigne – Laurent Barth, « Racines métisses » 2021

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Photo : Bertrand Ferrier

 

Rigolos finissent par être ces vins dont la dénomination évoque plus un titre de disque (ici de Yannick Noah ou de Line Renaud) qu’une étiquette de bouteille. Cependant, « Racines métisses » a un double sens, nous explique notre dealer préféré, Thierry Welschinger. D’une part, l’appellation rend hommage au globe-trottisme de Laurent Barth, son vrai fomenteur, avec une feuille de vigne tissée des alphabets liés aux pays jadis traversés par le vigneron. D’autre part, elle rend raison de l’assemblage ici réalisé avec, nous souffle-t-on,

  • un max de pinot auxerrois,
  • pas mal de muscat et de riesling (on est en Alsace), ainsi que
  • du pinot gris et une once de gewürztraminer.

La robe est jaune pâle, richement parée de petits pétillements inattendus.
Le nez a la fraîcheur herbacée du champagne. C’est discret et prometteur comme des feuilles d’arbres fruitiers avant qu’elles ne soient fricassées entre les doigts.
La bouche est d’abord clairement à l’orange, puis le spectre des agrumes s’ouvre jusqu’à laisser deviner de la pulpe de pamplemousse. Comme on est foufou, on décide même qu’il y a un retour de type herbacé ou floral. Puisque, en sus, on est déglingo, on trouve ça wow. Ben, c’est l’avantage des qui n’y connaissent rien : ils osent dire les choses telles que, d’après eux, elles sont.
Les mariages polymorphes visent à acoquiner le breuvage avec trois fromages disparates. Pour ces trouples, ce vin affichant presque quinze euros en cave parisienne se révèle à la hauteur de l’investissement plaisir, et hop.

  • Avec la vache semi-molle, il relève la douceur par une âcreté sapide.
  • Avec l’ossau-iraty, son amertume se révèle et réveille la pâte dure.
  • Avec le comté dix-huit mois, le jus dévoile sa fraîcheur et tend presque vers les saveurs du vin ouillé.

Belle ouvrage, en somme, du faiseur et du receleur. Après dégustation, nous dirions avec Pierre Reverdy qu’

 

il y a de l’espoir sur la planche
des rêves à nourrir
des chansons à pleins bras
et pas de regard en arrière
où l’orage et le sang s’évaporent déjà
([1949] in : Main d’œuvre, 1981, « Poésie », 2000, p. 517).