Fruits de la vigne – À côté 2022 du domaine Charvin

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Photo : Bertrand Ferrier

 

Connu pour ses châteauneuf-du-pape, le domaine de Laurent Charvin produit aussi des vins d’appellation moins prestigieuses. On suppose que, parce que ses parcelles ressortissant de l’IGP d’Orange jouxtent ou quasi les vedettes maison, il a brandé le vin que nous allons goûter – disponible sur Internet pour 10 € hors frais de port – sous la marque « À côté » (ou sera-ce parce que, avec du merlot inside, le jus passe à côté de la plaque ou des chartes en vigueur pour telle appellation plus froufoutante ?).

  • La solide teneur en alcool, alors que tant de vignerons cherchent le 12,5° pour ne point effaroucher les vierges ayant la dalle en pente précautionneuse,
  • la réputation de l’agriculteur, engagé dans une production moins chargée en pschitt-pschitteries que certains malins de l’agro-industrie, et même
  • l’étiquette travaillée mais plus rustique qu’enfarinée dans une élégance design qui fleurerait mauvais le vélocipédiste parisien arborant
    • casque très cher mais faussement vintage,
    • réflecteurs aux normes européennes sur un gilet pas jaune floqué #jerespectelaloietlesfdoetvous?, et
    • sentiment d’être gravement victime de stigmatisation rappelant les pires heures nauséabondes de notre Histoire quand un simple piéton, plouc par excellence puisqu’il n’est pas même doté d’une trottinette électrique alors qu’on en trouve de très bien pour moins de deux mille euros, l’invite à aller se faire bien emphysiquer – sauf s’il aime ça – en lui refusant la priorité sur un trottoir alors qu’il est père de famille et qu’il a voté pour chaque élection depuis ses dix-huit ans – sauf une fois, d’accord, ça va, on boit une tisane au miel du Tibet et on arrête le caca nerveux – parce qu’il était en voyage d’intégration à Courche (c’est dingue, quand même, les ennemis de la mobilité douce alors que
      • le réchauffement climatique,
      • la difficulté de trouver une forêt dans Paris pour enlacer des arbres afin de se reconnecter à son moi naturel et, surtout,
      • l’antimacronisme primaire, populiste, facho-complotiste et déconnecté de la réalité des entreprises créant de l’emploi, cette tare française encouragée par l’extrême-gauche et qui met en fragilité le logiciel de la République, puisse Manuel Valls, grand serviteur de l’État et de la Catalogne et d’Israël, merde, s’il en est, y mettre un terme),

inspirent plutôt confiance, d’autant que la quille est conseillée par le presque petit jeune du duo de Mes accords mets vins, repère qui nous sert de dealer pour les occasions belles ou, simplement, joyeuses, ce qui n’est ni contradictoire, ni si pire, on en conviendra.
La robe du vin non filtré (on connaît le grrrrand débat entre autoproclamés spécialistes experts sachants sur « le risque » de ce non-filtrage) est

  • souple voire mouvante,
  • spectrale (au sens où elle n’est certes pas uniforme – idéal pour ceux qui, mauvais citoyens ou zozos instruits par l’expérience, n’ont pas un amour spontané pour le costume unique) et
  • ouverte, allant du rose type cerise au sirop jusqu’au grenat intense en fond de puits.

Le nez est

  • franc,
  • costaud et
  • intrigant.

On croit y déceler, pêle-mêle,

  • du café,
  • de la terre,
  • un zeste de fruit rouge (cassis ? fraise ?) et
  • une pincée de cannelle – mélange étrange et réussi.

La bouche est

  • puissante sans être rugueuse,
  • joyeusement amère sans être grinçante,
  • à la lisière d’une astringence audacieuse, dans une première approche, sans toutefois s’y complaire.

Le mariage avec une ballotine de faisan pistachée, eh oui, est une comédie en trois actes.

  • Acte I : la douceur du mets met (haha) en valeur la robustesse du vin.
  • Acte II : les saveurs liquides et solides semblent se révéler au contact les unes des autres.
  • Acte III : comme il arrive entre gens de bonne compagnie, l’harmonie se construit par le dialogue. Les résonances du vin s’amplifient quand on sirote une lichette après avoir grignoté un bout. À l’inverse, manger après avoir suçoté une larme du nectar
    • souligne les finesses du plat,
    • rehausse sa sapidité et
    • sertit la pistache qui s’y lovait.

Comme disent les poètes que nous aimons citer en fin de critique viticole : « Super. » Bah, s’ils ne le disent pas, en la circonstance, ils devraient.